Une enquête récente de l’auteur auprès des fondations collectives a montré que les taux d’intérêt négatifs ne sont pas au coeur des défis actuels pour la plupart d’entre elles. Le poids des taux d’intérêt négatifs n’est pas perçu en soi comme une exacerbation de la concurrence, d’autant plus que tout le monde est concerné.
En y regardant de plus près, il apparaît toutefois que les caisses détiennent des niveaux de liquidité variables en raison de leur taille et de leur stratégie de placement. Alors que les petites caisses restent parfois en dessous des montants exonérés par les banques qui gèrent leurs comptes, et ne paient donc pas d’intérêts négatifs sur leurs liquidités, les grandes fondations collectives sont directement concernées et doivent jouer davantage de leur pouvoir de négociation. D’une manière générale, les liquidités sont gérées avec plus de rigueur.
Taux techniques presqu’aussi bas que ceux des fondations d’entreprise
Le niveau généralement bas des taux d’intérêt est jugé beaucoup plus préoccupant pour la sécurité financière. Il contraint les fondations collectives – comme toutes les caisses de pensions – à adapter les paramètres techniques, en particulier le taux d’intérêt technique. Si ce n’est déjà fait, ce dernier est maintenant réorienté à la baisse pour le faire passer en dessous du rendement attendu des actifs investis, comme le demande par ailleurs la directive technique DTA 4 révisée. Tant l’étude Swisscanto sur les caisses de pensions que les réponses à l’enquête non représentative montrent que les fondations collectives font leurs devoirs et appliquent un taux d’intérêt technique qui, en moyenne, est à peine supérieur à celui des fondations d’entreprise. Cette mesure visant à réduire le rendement cible se répercute sur le degré de couverture et, si elle est systématiquement appliquée, aussi sur le taux de conversion.
La concurrence se fait par le biais du degré de couverture et du taux de conversion
C’est à ce niveau que le dilemme entre l’équilibre financier et la compétitivité devient apparent. Une fondation collective déficitaire ne se vend guère, car le taux de couverture est l’indicateur le plus facile à communiquer qui renseigne sur la santé financière d’une caisse de pensions. Le degré de couverture d’une fondation collective devrait se situer dans une fourchette qui suggère une sécurité financière suffisante, sans toutefois nécessiter un rachat de réserves de fluctuations de valeurs. Il en va de même pour les taux de conversion: la plupart des salariés d’aujourd’hui ne s’y intéressent guère parce qu’ils sont encore loin de la retraite, mais les taux de conversion restent néanmoins un argument de vente d’une grande importance psychologique lors de la décision de s’affilier à une fondation collective.
A l’inverse, diverses fondations collectives ont dans leur portefeuille des effectifs dont le plan de prévoyance est proche du minimum LPP et qui sont donc de facto soumis au taux de conversion légal. Dans de tels cas, même un taux de conversion très bas sur les avoirs de vieillesse surobligatoires ne parvient pas à contribuer durablement à la stabilité financière de l’institution de prévoyance, car ces avoirs sont proportionnellement insuffisants.
Chaque point de base compte du côté actif
Les fondations collectives ne se contentent pas de simplement faire le nécessaire du côté passif du bilan. Les stratégies de placement ont été élargies pour inclure d’autres formes de placement générant des rendements et les liquidités ont été réduites au minimum ou réparties sur plusieurs institutions. La moindre opportunité de gagner un point de base supplémentaire est aujourd’hui scrupuleusement exploitée.
Même si peu d’indicateurs laissent présager une hausse rapide des taux d’intérêt, une attention plus soutenue est aussi accordée à la gestion des risques. Dans le cadre d’études de congruence, divers scénarios sont analysés et les placements planifiés en conséquence. Ainsi, les titres à intérêt variable sont de plus en plus populaires. Et les grandes fondations collectives développent aussi un appétit grandissant pour l’immobilier à l’étranger, ainsi que les placements non cotés (dette privée ou dette infrastructure privée).
Le niveau des taux d’intérêt remet en question le niveau des prestations futures
Les fondations collectives ne s’estiment pas plus affectées par les taux d’intérêt négatifs que les autres caisses de pensions. Ces taux d’intérêt sont parfois considérés comme une complication supplémentaire, sans toutefois entraîner des effets de distorsion sur le marché. D’ailleurs, les fondations collectives affirment de manière unanime que ce ne sont pas les intérêts négatifs sur les comptes qui les préoccupent, mais plutôt le niveau généralement bas des taux d’intérêt qui affecte tous les placements et met en péril le niveau des prestations futures.